Dans deux ou trois ans, le film tiré de cette affaire fera sans doute autant d'entrées que celui de David Fincher sur Facebook, "The Social Network". Le scandale de la "Fuck List" de Duke University, aux Etats-Unis, intéresse déjà des éditeurs et provoque les interprétations les plus variées. Quand Karen Owen, 22 ans, a noté les performances sexuelles de treize garçons sous forme d'une fausse thèse universitaire, au mois de mai, elle ne le faisait que pour amuser trois de ses amies.
Moins de six mois plus tard, après la révélation du PDF de 42 pages par deux sites web américains, Karen Owen est une célébrité traquée par les médias, et sa fausse thèse est commentée dans tout le monde anglo-saxon, jusqu'en Afrique du Sud ou en Nouvelle-Zélande.
La jeune diplômée de Duke, l'une des plus prestigieuses universités américaines − déjà secouée par un scandale sexuel en 2006 −, aurait dû se méfier de ses amies. L'une d'elles a transmis le document à des copines, qui l'ont à leur tour partagé à des connaissances… La viralité a fait le reste, et le 30 septembre à 15 heures, heure locale, le site Jezebel.com révèle le document en masquant les identités et visages des cobayes. Une minute plus tard, un site du même groupe, Deadspin.com, fait la même chose mais en laissant les visages.
"Une éducation au-delà de la salle de cours : exceller dans le domaine des études horizontales" est le titre du document, qualifié ironiquement de "thèse de deuxième cycle" par Karen Owen. En bonne étudiante, elle détaille sa méthode, basée sur
"une série de critères établie bien avant de débuter son projet de recherche" :
* attractivité physique,
* taille du sexe (longueur et épaisseur),
* talent,
* créativité,
* agressivité (un critère positif)
* divertissement,
* capacités athlétiques,
* bonus : un accent australien ou des talents de surfeur.
Elle note ensuite sur 10 (de 1 à 10,25…) les treize étudiants avec qui elle a eu des expériences sexuelles ces deux dernières années. Les termes sont crus, entre description anatomique précise et humour légèrement lourdingue.
A propos d'un joueur de baseball gratifié d'un 8/10 :
"Moments mémorables : le lendemain, je ne pouvais plus marcher. Pouvais. Plus. Marcher. Pour les meilleures raisons qui soient, évidemment.(...)
Les "pour" : ai-je déjà dit que je ne pouvais plus marcher le lendemain ? Il était très, très bien équipé. Et il savait comment utiliser ses outils. "
Sur une "star de tennis" − le sport compte beaucoup dans les universités américaines − écopant d'un 1/10 :
"C'est pendant le retour en taxi que j'ai découvert qu'il était mal élevé, canadien, et s'exprimait surtout en français. Inutile de dire que mes signaux d'alarme clignotaient furieusement, même si, dans l'intérêt de ma recherche et poussée par une curiosité perverse, je décidais de continuer vers son appartement. "
Avant de supprimer ses profils de tous les réseaux sociaux et de se cloîtrer quelques jours chez elle, Karen Owen s'est confiée à Jezebel.com, dans l'article qui révélait ce que les médias américains ont baptisé sa "Fuck List" :
" Je regrette cet acte de tout mon cœur. Je n'ai jamais eu l'intention de blesser les gens qui sont mentionnés dans cette liste. "
Douze heures plus tard, un éditeur et un agent avaient déjà écrit au site web. L'éditeur, de chez HarperCollins, une des plus grosses maisons de la planète, disait :
"Même si je suis sûr qu'elle est horrifiée que sa… disons… présentation destinée à un petit groupe d'amis soit devenue virale, elle écrit très bien et de manière très drôle, et je me demande si elle serait intéressée par l'écriture d'un livre. "
L'éditeur la compare ensuite à Tucker Max, un blogueur devenu célèbre en racontant ses frasques sexuelles.
Depuis deux semaines, celles de Karen Owen suscitent des commentaires nombreux, et parfois totalement contradictoires.
Ainsi, et pour ne citer que ces deux-là, son geste serait la preuve d'une revanche des femmes sur le machisme, lit-on dans une revue de presse du site américain Womenissues.com consacrée aux implications du scandale :
"Les médias voient cette affaire comme extrêmement excitante, et comme l'aveu éclatant que les femmes peuvent être aussi nonchalantes avec le sexe que les hommes. Ils y voient aussi un renversement des rôles et une prise de pouvoir par les femmes. "
Mais pour Zoe Margolis, une chroniqueuse du Guardian britannique, l'affaire Karen Owen "renforce les stéréotypes sexistes" :
"Plutôt que de se focaliser sur son plaisir, ou sur le fait que ses désirs sexuels soient comblés, Karen Owen semble plus inquiète de recevoir une validation extérieure de son attractivité.
Elle renforce ainsi une idée : ce que les femmes cherchent vraiment, c'est d'être sexuellement désirées par les hommes. "
source rue89.
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