Dossier ubuesque fin mai, à la barre du tribunal correctionnel où trois personnes comparaissaient pour recel et suppression de correspondance par dépositaire de l'autorité publique. Le plaignant avait écopé d'une peine avec sursis pour l'envoi de 4 cartes postales osées, avant d'être relaxé en appel.
La partie civile était représentée par un ténor du barreau parisien, Me Jean-Paul Baduel, hier au tribunal. Son client Philippe Pissier, plasticien établi à Castelnau-Montratier, avait défrayé la chronique en mai 2009 ; il y comparaissait alors pour avoir envoyé quatre cartes postales montrant des photos de Castelnau agrémentées d'un montage. En l'occurrence une poitrine féminine dénudée et des pinces à linge pinçant les tétons. Au moment du procès, pour le procureur Éric Seguin, l'infraction d'atteinte à la dignité était constituée. Dans son réquisitoire, il avait demandé deux mois avec sursis.
Saisi par une citation directe, le tribunal a appelé, hier à la barre, les deux responsables de la Poste ainsi que le capitaine de gendarmerie, alors en charge de l'enquête. Il leur est reproché un délit de dénonciation mensongère, et recel de détournement de correspondance.
"Dans ce dossier, je demande au tribunal de statuer sur l'abus de pouvoir. Ce n'est pas un trafic de stupéfiants, c'est une vision esthétique des choses, avance Me Jean-Paul Baduel. La cour d'appel d'Agen a estimé qu'il n'y avait aucun caractère pornographique et a relaxé mon client. Suite aux cartes postales données physiquement par un postier à la gendarmerie, on a fait des perquisitions chez mon client. On lui a pris son ordinateur pour voir s'il n'y avait pas un site à caractère pornographique. L'expertise a conduit à la transformation sur CD-Rom de la mémoire de l'ordinateur. Elle a été placée sous scellé et toujours pas rendue".
"Je ne suis pas à l'origine des poursuites, observe Thiffany Gamain, substitut au procureur. J'ai cru entendre que l'on replaidait la culpabilité ou non de M. Pissier. Il est innocent des faits pour lesquels il était poursuivi. Pour autant, est-ce que ça rend illégitime les enquêtes qui ont été diligentées. Faut-il mettre en cause la qualité du travail qui a été faite par les enquêteurs ? Sur le recel reproché au capitaine de gendarmerie, on est dans une situation extravagante : comment pouvait-il savoir que les cartes provenaient d'une infraction ? Je demande la relaxe".
"Une employée a été choquée par ces cartes postales, rappelle un des responsables de la Poste. J'ai indiqué à la gendarmerie qu'il y avait à Cahors, des cartes postales particulières. Elles portaient atteinte à l'image de la femme".
"Pour se faire reconnaître artiste, il y a le talent et il y a l'esclandre. Mon client a œuvré pendant des années au centre de recherche de Cahors, plaide Me Laurent Belou, avocat du capitaine de gendarmerie. Il n'apprécie pas qu'à cause d'une carte postale, Cahors soit connu dans le monde entier. M. Pissier est en train de mettre en place, par son raisonnement, un raisonnement totalitaire. M. Pissier doit faire la distinction entre le débat judiciaire loyal et la calomnie. Je trouve inacceptable qu'on puisse mettre sur le net une lettre qui traîne mon client dans la boue. Là on devient une société totalitaire".
Le jugement a été mis en délibéré au 7 juillet.
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